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Avocat Ducharlet

Sportif blessé : Faut voir et écouter le docteur

09 juillet 2019

Posté dans Droit du travail

Sportif professionnel blessé : Faut voir et écouter le docteur !

Blessé dans le cadre de sa pratique professionnelle du basket, il pensait pouvoir rester tranquille chez lui. « A ma reprise, les amis », aurait-il pu dire à ses coéquipiers et ses coachs après sa blessure l’éloignant des parquets.

Blessé et placé en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail, le salarié voit en effet, son contrat de travail suspendu et bénéficie durant cette période d’inactivité, d’une protection forte contre toute mesure de licenciement.

Ce totem de protection contre la rupture de son contrat de travail est offert par l’article L.1226-9 du Code du travail suivant lequel « au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie. »

Aussi, M. W… notre basketteur professionnel, pouvait légitimement considérer qu’il était libéré, délivré de toute obligation à l’égard du parquet et de son entourage professionnel (le Club JDA basket).

Il ne pouvait pas - comme bon nombre-, envisager que cette « liberación » n’était pas totale et qu’il pouvait prendre « la porta » pour faute grave qui plus est, au cours de son arrêt de travail pour raisons médicales et de son contrat à durée déterminée de 3 saisons.

C’est pourtant ce qu’il lui est arrivé… en toute légalité dixit les juges qui ont successivement examiné l’affaire.

Aux termes d’un arrêt rendu en date du 20 février 2019 et à l’instar de la juridiction d’appel dijonnaise, la chambre sociale de la Cour de cassation est en effet, venue rappeler que pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l’employeur peut être admis à rompre un contrat de travail s’il justifie d’une faute grave commise par le salarié (Cass. soc. 20 février 2019, n° 17-18912)

Une faute grave ? Quésaco ? 

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis (CA Toulouse 15 juin 2018 n°16/05622).

Au rang des fautes graves admises par les tribunaux, l’on retrouve depuis de nombreuses années tout manquement commis par le salarié, à l’obligation de loyauté contracté en faveur de son employeur (Cass. soc. 15 juin 1999, n° 96-44.772).

Dans l’affaire examinée aujourd’hui, les juges ont considéré que le fait pour un sportif professionnel de ne pas se soumettre pendant son arrêt maladie au protocole de soin faisait ressortir l'existence d'un manquement du salarié à son obligation de loyauté rendant impossible la poursuite du contrat de travail.

En détail, la Haute Cour a jugé que la spécificité du métier de sportif professionnel obligeant un salarié, en cas de blessure, à se prêter aux soins nécessaires à la restauration de son potentiel physique, le fait que M. W…. n'ait pas honoré le rendez-vous destiné à organiser les séances de kinésithérapie prescrites par le médecin traitant de l'équipe et qu'il n'était pas demeuré à la disposition du kinésithérapeute pour suivre le protocole de soins constituait une faute grave justifiant la rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée.

A bon entendeur, un arrêt de travail pour raisons médicales ne rime pas avec vacances et insouciance !